“Quand mon dernier ami est mort, j’ai quitté le village…”. Prononcé mezza voce par Thierry Lefèvre, son ami de toujours, la première phrase d’un des derniers textes d’Eric Durnez, disparu le 6 juin à 55 ans, a une autre résonance lorsqu'on les entend aux Rencontres de Huy, là où ont été créés tous les textes d'Eric Durnez :
Brousailles,
Echange Clarinette,
Sam, autant de perles qui s'adressent à tous les publics en réalité. C'est aussi vrai, et peut-être plus encore, pour
Le dernier ami où l'on reconnaît d'emblée le style Durnez. Avec ses mots choisis, ciselés, singuliers, distillés. Jamais inutiles. Toujours intemporels et universels. Et plus beaux encore dans
Le dernier ami parce que l’essentiel se dit entre deux portes, sur le trottoir ou un quai de gare, avant qu’il ne soit trop tard. Un essentiel que Sam a pu dire à son hôte vagabond avant qu’il ne quitte le village. Seul, pieds nus, en casquette et singlet devant une porte de bois brut aux rideaux brodés, Thierry Lefèvre raconte: “Mon dernier ami… c’était aussi le premier. D’ailleurs… Je dis toujours d’ailleurs…” Le ton d’Eric Durnez est donné. Tout en retenue, habité, le comédien plus talentueux que jamais poursuit, avec ses airs d’enfant perdu, et un accent du midi lorsqu’il s’impose, le récit de ce vagabond en quête d’un logement, de cette rencontre improbable avec Sam, un homme étrange et âpre au passé pesant comme on le découvrira par la suite. Un moment de grâce. (L.B)