Dans la vie, quand on rencontre quelqu'un pour la première fois, on sent tout de suite si ça va "coller". Ou pas. Au théâtre, ça doit se passer comme ça aussi. Même si on joue encore plus que dans la vie. Quoique... Miser sur une rencontre, c'est un pari risqué. Surtout quand le texte tout entier tient sur cette rencontre. Et si l'étincelle n'avait pas lieu? S'il ne passait rien, pas d'échange, aucun regard? Et si chacun jouait dans son coin, essayant de tirer la couverture à soi? Philippe Sireuil a pris un texte de Marguerite Duras et a tissé un pont entre deux personnalités, deux tempéraments, deux talents, deux générations qui ne s'étaient pas encore croisés jusque là. A ma gauche, Jacqueline Bir. Un parcours exemplaire, une histoire de théâtre, des rôles qui se sont imprimés dans notre mémoire. A ma droite, Edwige Baily: des débuts en 2004, une douzaine de rôles sur scène dont
Bash, Un
Faust ou
Pleurez mes yeux pleurez. Au centre, non pas un ring mais un plateau nu. Ou presque. Il y avait le risque d'un combat inégal, la tentation de la comparaison. Au final, un face à face aussi magique que fragile. La maturité et la jeunesse sur le même fil. Si l'une des deux flanche ou fait un faux pas, ce sont les deux qui tombent. Et dans
Savannah Bay, elles sont toutes les deux restées debout. Côte à côte. E.R.
Savannah Bay, Marguerite Duras, Théâtre de la place des Martyrs Savannah Bay