Selma Alaoui a le goût du risque. Avec
Bartleby de Melville et
La Mère de Witkiewicz, textes non-théâtraux, elle mêle deux univers assez éloignés, unis par le sentiment d’échec et la mélancolie : une synthèse d’une justesse étonnante. Le scribe Bartleby, employé modèle d’un «bon patron» entre dans une dissidence aussi polie qu’implacable, résumée par la formule «
I would prefer not to » (je préférerais ne pas). Mais la dissidence sociale creuse plus profond. Avec
La Mère, Selma Alaoui reconstruit un des fondements de la mélancolie, le rapport, complètement tordu et joyeusement iconoclaste, entre une mère et un fils: Anne-Marie Loop et Vincent Minne forment un «couple» explosif qui nous rend proche cette folie douce.
Selma Alaoui, Française, maîtrise de lettres en poche, se forme à l’Insas et refait sa famille en Belgique, comme actrice et metteuse en scène. Actrice elle déploie une énergie convaincante dans
Blanche-Neige de Nicolas Luçon, la reprise de
Hansel et Gretel, d’A-C. Vandalem et J.B. Ugeux ou encore
Ivanov Re/Mix d’Armel Roussel. Dès 2007, sa mise en scène d’
Anticlimax, de Werner Schwab, lui vaut un des prix de la critique, comme meilleure découverte. Cerise sur le gâteau: cet automne elle est assistante de K.Warlikowski, pour
Trois contes africains d’après Shakespeare, au Théâtre de la Place. C.J.
par Selma Alaoui