A peine sortie de l’Insas, Eline Schumacher, comédienne de 23 ans, a cultivé un génial
Manger des épinards, c’est bien, conduire une voiture c’est mieux, voyage acidulé sur la perte de l’innocence. «
Peter Pan vit au pays imaginaire. Moi, j’habite en Belgique. C’est pas grave, » annonce-t-elle en prélude à son théâtre d’objet décalé qui la voit résister à l’âge adulte. Avec son complice Simon Vialle, elle plonge dans les délices de l’enfance avec une ironie subversive qui la fait aussi glisser vers de moins innocents ébats, voire de très sensuels tableaux. Car grandir, c’est aussi découvrir d’autres corps, d’autres jeux et d’autres plaisirs. On goûte tantôt au sucré acidulé de l’enfance (une reconstitution miniature du film
Hook, avec lancer de flèches, de sable et d’eau sur les spectateurs, un album de photos souvenirs qui s’envolent à tire d’ailes, une toupie à la ronde insouciante), tantôt au piquant de l’âge adulte (des doigts qui s’enfoncent dans la confiture avec une jouissance explicite, de mystérieux messages tartinés à la purée d’épinards sur les corps nus). Un peu de talc sur une main évoque le temps qui passe, un bonbon en forme de spaghetti gélatineuse - clin d’œil à la Belle et le Clochard - traduit l’éveil du désir, une bataille d’oreillers au ralenti raconte la passion amoureuse. Un bonsaï, quelques cigarettes, deux pieds qui se cherchent, un cadre de guingois : les gestes et les objets sont plus forts que les mots pour raconter le douloureux passage vers l’âge adulte, le tout musicalement branché sur les années 80. De quoi faire encore mieux passer les épinards ! C M.