Seule sur la scène du Théâtre des Martyrs, Thereza Stangl, va se confesser devant nous en revisitant sa vie
Nous nous trouvons à Sao Paulo, dans la maison où elle est restée après la mort de son mari, Franz Stangl, ancien commandant SS des camps d’extermination de Sobibor et de Treblinka, arrêté au brésil 16 ans après son arrivée en Amérique du Sud, extradé vers l’Allemagne par Simon Wiesenthal et condamné à la réclusion à perpétuité.
Nous sommes en 1971 et Thereza reçoit la journaliste Gitta Sereny. Cette visite inopportune et les questions qui lui sont posées vont la bousculer.
C’est Janine Godinas qui incarne cette vieille femme arrivée au bout de sa vie. Avec, face à elle et sa solitude, l’inracontable. Mais aussi ses colères, ses émotions et surtout ses doutes. Avec une question abyssale : est-ce qu’elle aurait pu arrêter cela ? Le public sort du spectacle touché et même ébranlé par la force du texte et l’interprétation intense et sans faille de Janine Godinas qui nous livre ici un de ses plus beaux rôles. D.C
"Un grand amour", texte de Nicole Malinconi, mise en scène de Jean-Claude Berutti, scénographie de Rudy Sabounghi, interprétation : Janine Godinas.
Théâtre des Martyrs, production : Rideau de Bruxelles
de Nicole Malinconi, adaptation et mise en scène de Jean-Claude Berutti, avec Janine Godinas.
Tranches de vie kinoises et belges !
Sur le plateau, juste une chaise sous une lumière blafarde avec en fond sonore des commentaires de match de football. « Bagnole menottes poste de police. Ça a commencé comme ça, m'dame. » Le Congolais arrêté en situation irrégulière à Bruxelles explique à l’avocate commise d'office son arrestation par la police et son interrogatoire par deux policiers qui le soupçonnent d'être un terroriste potentiel. Les mêmes questions se répètent et les policiers enragent de n'avoir rien sur lui. Et lui garde le silence depuis deux jours.
Mais regarder un match de foot, le quart de finale de la coupe d'Europe qui oppose la Belgique au Pays de Galles, entre deux flics les menottes aux poings, c’est trop dur. L'adrénaline monte, et lorsque la frappe de Nainggolan envoie le ballon dans la lucarne, il explose de joie. Mais les Diables s'inclinent, et là, les flics ont les boules. A défaut d'être terroriste, le Congolais est à tout le moins clandestin. Direction le centre 127 bis et l'entretien avec cette avocate peu motivée.
Seul en scène David Minor Ilunga détaille la vie quotidienne au bled, Kinshasa, Kin pour les initiés. Délestage parce que tout y est discontinu, l'électricité trois jours sur sept, quand on a de la chance, et ne parlons pas de l’eau potable... Il livre également le portrait d'une Europe, et plus particulièrement d'une Belgique, dans ses rapports avec les ressortissants des anciennes colonies. D.B.
« Délestage » de et avec David-Minor Ilunga Mise en scène de Roland Mahauden. Créé au Théâtre de Poche. Coproduction le Théâtre de Poche, Le Tarmac (Paris), La Charge du Rhinocéros et les Récréâtrales (Ouagadougou)
de et avec David-Minor Ilunga. Mise en scène de Roland Mahauden.
Comment accompagner les derniers mois d'une vie, éprouver la perte, digérer le deuil ? C'est le versant "Catherine" de la promesse d'une fille à son père. Le versant "Michel", lui, retrace plus largement le parcours de cet avocat fils de gardien de prison, petit-fils de policier. Y compris la fameuse "affaire Graindorge" - quand, à l’été 1979, l’avocat fut arrêté, suspecté d’avoir aidé son client François Besse (bras droit de Jacques Mesrine et passe-muraille patenté) dans sa spectaculaire évasion avec prise d’otage, en pleine audience. Michel Graindorge passera quatre mois en détention avant d’être acquitté. L’épisode - outre qu’il impliquait un homme très engagé dans la question des conditions carcérales et de la réinsertion - aura marqué les esprits dans le grand public, et a fortiori celui d’une petite fille criant devant les caméras "Papa, avec moi !"
Devenue comédienne et musicienne, et, dans ses derniers mois "sa confidente, son aide-soignante, sa mère", Catherine a promis à Michel un spectacle, né deux ans et demi après la mort de ce père peu ordinaire. En mots, en images, en sons, elle y distille les souvenirs, précis, cocasses, graves. La vie, vécue, pensée. La trace, ce qu’a laissé l’absent, ce qu’il raconte à travers le journal qu’il a tenu, les livres qu’il a écrits, ceux qu’il a amassés, celui, inachevé, qu’il dictait d’une voix sûre sur un petit cassettophone.
Cette matière foisonnante et vivante, Catherine Graindorge la façonne dans un langage où l’intime d’un homme, d’une famille, tutoie l’histoire d’un pays. Un langage élaboré avec le concours de Bernard Van Eeghem (collaborateur artistique), Jorge León (dramaturgie), Elie Rabinovitch (vidéo), Gaëtan van den Berg (lumières), Marie Szersnovicz (costumes). Car un seul en scène se construit à plusieurs… Celui-ci, ciselé avec pudeur et générosité, concilie l’homme public et le père. Promesse tenue. M.Ba.
Avant la fin de et avec Catherine Graindorge
Créé au Théâtre Les Tanneurs
Coproduction Théâtre Les Tanneurs et Théâtre de Namur
de et avec Catherine Graindorge.