Paul Van Mulder

/photos/Paul_Van_Mulder.jpgLa Belgique avait un peu perdu de vue Paul Van Mulder, non par ingratitude (il avait été fêté au Parc, au Rideau de Bruxelles...) mais par éloignement volontaire dans la jungle parisienne où depuis 25 ans, ce comédien, formé à Mons et Bruxelles avant le conservatoire de Paris, avait tracé un parcours enviable, entre l'interprétation et la mise en scène, la télévision, le cinéma et le théâtre: Comédie française, Bouffes du Nord, Cartoucherie de Vincennes, Théâtre du Cinabre qu'il avait fondé à Paris. L'année dernière, il a choisi de revenir sur ses belges terres... avec un texte inédit, une première écriture, la sienne : La solitude d'un acteur de peep-show avant son entrée en scène , aujourd'hui édité chez Maelström. Il lui a donné sa voix, son corps, sa pudeur, son urgence de dire. Coup de maître... et d'émotion dans ce seul en scène, travaillé avec Pascal Crochet, accueilli à l'Atelier 210. A des lieues de toute complaisance voyeuriste ou larmoyante, cette Solitude d'un acteur de peep show est celle de tous les êtres fragiles, qui ne sont ancrés nulle part, sur qui un regard d'amour tarde à se poser. Lucarnes de sourire, échappées poétiques, éclats de violences, d'effroi, confidences écorchées: une palette de tons contrastée, en tension croissante, un corps qui révèle autant que la voix sur un plateau dépouillé. Une présence, obsédante, bouleversante de Paul Van Mulder. M.F.

La solitude d'un acteur de peep-show avant son entrée en scène de Paul Van Mulder, mise en scène de Pascal Crochet, Atelier 210, Château de Seneffe, Théâtre au vert à Thoricourt. Reprise du 27 au 29 novembre 2008 au Centre Wallonie-Bruxelles à Paris et en septembre-octobre 2009 au Théâtre de la Place des Martyrs.

elu

Isabelle Wéry

/photos/IsabelleWery.jpgC’est une Isabelle Wéry toujours plus hallucinogène qu’on a découverte au Théâtre de la Vie dans La Tranche de Jean-Daniel Magnin, jouant à elle seule un texte qui avait nécessité cinq comédiens à sa première création à Avignon en 1993. Joli morceau de viande sans gras mais plein de nerfs que ce conte initiatique retraçant l’aventure du Grand, jeune coq qui tente de fuir une famille aux allures de basse-cour par une nuit de délires à la rencontre de bêtes étranges, métaphores de ses fantasmes, entre autres sexuels : une séductrice rapace, un loup-garou aux tendances homosexuelles ou encore d’une rouquine qui chasse les renards. Il fallait une dent bien affûtée pour mordre dans l’épaisse rondelle de folie, cet univers de conte d’un Petit Poucet qui aurait été revu par David Lynch. Isabelle Wéry n’a fait qu’une bouchée de cette Tranche, se permettant toutes les libertés dans la mise en scène : elle apparaît sous un sapin de Noël rose pendu à l’envers, dont les boules sont autant d’accessoires évoquant les personnages : une pelote de laine pour la mère, une pipe pour le père, etc. Et puis surtout, ce musculeux et saignant morceau de viande crue, pendouillant de manière menaçante pour suggérer cette tranche de viande que la mère met de côté pour son Grand et qu’il lui faudra bien finir par manger un jour. Avec un culot insensé et un jeu sensuel, rythmé et chamarré, l’actrice tranche dans le vif de cette viande généreuse. C.M.

La Tranche de Jean-Daniel Magnin, mise en scène d'Isabelle Wéry, au Théâtre de la Vie.

Bruno Coppens

/photos/Bruno_Coppens.jpgLa première passion de Bruno ce sont les mots. Il les aime tellement qu’il ne peut s’empêcher de jongler avec eux, de les jeter les uns sur les autres et d’observer le résultat de ces accidents verbaux. Il trouve que nous n’utilisons qu’un faible pourcentage des combinaisons que nous offrent les mots quand ils se cognent. C’est vrai que nous, on se contente de les dire dans un ordre commun, de faire comme tout le monde, de peur sans doute qu’on ne nous comprenne pas. Alors, comme ça le rend triste, Bruno, qu’on se contente de si peu, qu’on se limite à n’utiliser que deux ou trois centaines de mots dans notre vocabulaire courant, qu’on soit si peu exigeant dans nos recherches langagières, il s’est mis en tête d’élargir nos horizons. Du coup, en radio, en télé, surtout sur scène, il nous apprend que les mots ont des sens cachés. Mais au fil du temps, il a changé, Bruno. Pas dans son amour des mots. Dans son amour pour la scène. « Scènes de méninge », « Où cours-je? », « La tournée du Grand Dupe », « Le marchand de fables va passer », « Bain Zen » et aujourd’hui « Ma Terre Happy » l’ont vu véritablement éclore sur les planches. Si bien que Bruno n’est plus seulement un grand farfouilleur de dicos, il est un comédien. Il aime ça et ça se voit. A la manière qu’il a d’occuper l’espace d’une scène de théâtre comme celle du Jean Vilar à Louvain La Neuve où il planté son dernier seul en scène, après l'avoir créé au Festival de Spa et joué dans toute la Wallonie. On le sent heureux de jouer, Bruno. Et pas seulement avec les mots. PS: j’aurais pu tomber dans la facilité et glisser dans ce texte un jeu de mots par phrase mais à chacun son métier!. E.R.

Ma terre happy, de et par Bruno Coppens, mise en scène d'Eric de Staercke, Festival de Spa, Atelier Jean Vilar, en Wallonie. Reprise au Théâtre de la Place des Martys du 11/12/2008 au 2/1/2009