Dans «
Personne(s) », on sait d’emblée, lorsque la première enfant entre en scène et malgré l’appellation «
Projet-Quartier », que l'on va assister à un spectacle maîtrisé. La demoiselle n'a pas dix ans, mais elle monte sur les planches d'un pas sûr et, sans ciller, exécute quelques ronds de jambe. Elle est rejointe par l'ensemble de la troupe, 21 habitants des Marolles, sélectionnés selon trois catégories d'âges (6-12 ans, 18-30 ans, plus de 60). Il faut les voir, arriver, prendre place, s'enlacer, glisser sur le sol... Le travail sur le corps, sans pesanteur, est palpable. Sans heurts, les tableaux s'enchaînent. Par petits groupes, parfois même seuls, les danseurs investissent l'espace. Thierry Thieû Niang a réussi le pari de donner à chacun sa place. Les musiques donnent le tempo, mais chacun évolue à son rythme. C'est plein de couleurs mais c'est intensément sobre. C'est amateur mais pas approximatif. C'est toutes générations confondues mais ce n'est pas brouillon. Chacun son rôle, chacun existe. Mouvement après mouvement, image après image, on se laisse bouleverser par l'utopie recréée sur le plateau, sans mièvrerie aucune. Par l'espoir véhiculé par des corps qui, pour certains, ont déjà tant vécu. Par des âmes qui, le temps d'une saison, se sont données à la danse. A.N.
de Thierry Smits